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En avril, le Gouvernement a restreint l’accès aux lieux de résidences des personnes hébergées, empêchant même l’entrée des aidants. Les responsables des résidences jugeaient que leur accueil serait compliqué. Mais en mai, face à un barrage de reproches du public et une situation catastrophique, il a rétabli leur droit d’accès, malgré que les directions des établissements y voient toujours des difficultés.

On peut supposer que le Gouvernement perçoit probablement les proches aidants comme une main-d’œuvre significative pour se sortir d’une situation incontrôlable. Au sortir de la crise sanitaire, les proches aidants pourront-ils être reconnus comme de vrais partenaires du réseau de la santé?

Quel est le statut légal des proches aidants?

Le système de santé au Québec a été réformé dans les années 80 et le virage ambulatoire de 1995 visait à favoriser le maintien des personnes malades dans leur milieu de vie naturel. Depuis, les tâches et responsabilités des proches aidants (aussi appelés soignants familiaux ou aidants naturels) n’ont cessé de s’accroître. Et, « dans la foulée des réformes liées au virage ambulatoire, il appert que leur participation n’est plus seulement demandée, mais exigée au nom d’une nouvelle conscience socio sanitaire. » [1].

Depuis plus de 20 ans, on reconnaît un statut légal aux aidants qui dès 1992, se qualifient comme une « personne qui démontre un intérêt particulier » envers une personne qui reçoit des soins (usager), au sens de la loi [2]. En 2002, les proches aidants ont été reconnus à titre de personne proche qui fournit sans rémunération des soins et du soutien régulier à une autre personne [3]. Ils peuvent poser des gestes sans avoir à se soumettre aux obligations que doivent respecter les professionnels, comme les exercices dirigés, les changements de pansements et les prélèvements. Ils peuvent aussi se prévaloir de congés de leur emploi pour s’occuper d’une personne proche qui a besoin de soutien et d’assistance. Ce sont des absences ou des congés sans salaire pendant l’année [4].

L’évolution des politiques gouvernementales au Québec

La première politique faisant référence aux proches soignants remonte à 1992 au Québec. Elle énonçait parmi ses voies d’action prioritaires celle « d’accroître le soutien aux familles et aux ressources de la communauté qui interviennent auprès des personnes ayant des incapacités » [5].

Grâce à cette politique, le Gouvernement a reconnu que : « Le maintien de l’intégration sociale des personnes implique le développement des différents types de soutien dans la communauté et notamment un soutien professionnel nettement accru auprès des aidantes et aidants naturels, des services à domicile en nombre plus important ainsi qu’une disponibilité de ressources légères de répit et de dépannage. »

En 2001, vu le nombre croissant de personnes en perte d’autonomie vivant à domicile, le Gouvernement a énoncé dans ses orientations que le réseau de la santé et la collectivité « doivent prévoir des mesures pour soutenir les proches ». L’aide aux proches a donc été qualifiée d’essentielle et introduite « comme mesure de solidarité sociale » [6].

C’est en 2003 que le proche aidant a été qualifié de « partenaire » dans la Politique gouvernementale de soutien à domicile. On y reconnaît qu’il doit recevoir de l’information, de la formation et de la supervision pour les tâches qu’il accepte d’effectuer. [7] On y précise aussi que dans les services de longue durée, il faudra favoriser l’implication participative des aidants dans l’élaboration du plan d’intervention ou du plan de services individualisé qui concerne l’aidé [8]. En 2004, des précisions sont apportées sur l’implantation de la Politique de soutien à domicile [9].

En 2005, le Plan d’action gouvernemental a précisé que les « proches des personnes aînées sont moins nombreux et souvent moins disponibles » et qu’ils acceptent librement de remplir le rôle, mais que « l’affection des membres de la famille et des amis ne peut être réquisitionnée sans bornes » [10]. Afin de pallier l’absence de rémunération des proches aidants, un crédit d’impôt remboursable pour aînés a été mis en œuvre en 2006, en lien avec la Politique de soutien à domicile [11].

Bien que le proche aidant soit reconnu depuis près de 30 ans, tant au plan légal que par le biais des orientations et politiques gouvernementales, il apparaît clairement que son rôle n’est pas encore pleinement considéré dans le système de santé québécois.


[1] D. Saint-Charles et J.-C. Martin, « De la perspective d’“aidant naturel” à celle de “proche-soignant” : un passage nécessaire », Santé mentale du Québec, vol. 26 no 2, 2001, 227 ; www.erudit.org

[2] Loi sur les services de santé et services sociaux, RLRQ, c. S-4.2, art. 12

[3] Code des professions, RLRQ, c. C-26, art. 39.6; l’aide personnelle à domicile est déjà reconnue dans les lois et règlements suivants : Loi sur l’assurance automobile du Québec. LRLQ, c. A -25, et la Loi sur les accidents du travail et maladies professionnelles, LRLQ, c. A -3.001

[4] Loi sur les normes du travail, RLRQ, c. N-1.1, art. 79.2 et s.

[5] Ministère de la Santé et des Services sociaux, La politique de la santé et du bien-être, 1998, p. 128 (191p.)

[6] Ministère de la Santé et des Services sociaux, Orientations ministérielles sur les services offerts aux personnes âgées en perte d’autonomie, Février 2001, p. 5 et 30 (43p.)

[7] Ministère de la Santé et des Services sociaux, Chez soi : le premier choix – La politique de soutien à domicile, 2003, p. 6 et 35 (45p.)

[8] Ministère de la Santé et des Services sociaux, Un milieu de vie de qualité pour les personnes hébergées en CHSLD – Orientations ministérielles, Octobre 2003, p. 4, 11, 13 (33p.)

[9] Ministère de la Santé et des Services sociaux, Chez soi : le premier choix – Précisions pour favoriser l’implantation de la politique de soutien à domicile, 2004 (41p.)

[10] Ministère de la Santé et des Services sociaux, Un défi de solidarité – Les services aux aînés en perte d’autonomie – Plan d’action 2005-2010, 2005, p. 14 et 35 (45p.)

[11] Loi de l’impôt sur le revenu, SRC, 1985, ch.1, art. 118.2