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Depuis plus d’un mois, tant le télétravail que la télésanté se sont introduits dans notre quotidien. L’état de confinement nous a forcés à nous habituer à travailler et à communiquer autrement. La rencontre virtuelle vient maintenant pallier l’impossibilité d’une visite au bureau du psychologue, du physiothérapeute ou du médecin. Dans le contexte de la distanciation actuel, leur importance et leur utilisation se décuplent tout naturellement afin de répondre aux besoins continus.

Mais qu’entend-on par télésanté ? Existe-t-il des contraintes ou un encadrement légal à cette pratique ? Quels sont les enjeux éthiques qu’elle soulève ?

Intervenir à distance

L’urgence sanitaire propulse les pratiques à s’orienter vers l’utilisation des technologies de manière accélérée. Le recours aux technologies est devenu essentiel pour maintenir les soins en raison des restrictions imposées par les directives sanitaires. Les services de réadaptation (ergo, physio), de santé émotive (psychologie, psychiatrie) et les diagnostics qui n’exigent pas d’examen physique ont développé des moyens pour répondre aux besoins. Les actions à distance, les réunions virtuelles, les consultations, les suivis de patients grâce aux technologies permettent à certains égards et dans certains cas d’assurer la continuité des soins [1].

L’intervention à distance n’a pas que des avantages, elle comporte de nombreux enjeux légaux sont multiples : sécurité et confidentialité des informations, lieu présumé de la consultation, relation de confiance patient-professionnel, consentement sans face à face, circulation et conservation des informations, tenue de dossiers, défaillance des technologies, etc. On peut d’emblée affirmer que les interventions sont à portée limitée, car toutes ne peuvent être faites à distance. Néanmoins, les expériences passées, l’ouverture des milieux et les recommandations des dernières années permettent de considérer des formules à explorer.

En quoi consiste la télésanté ?

La télésanté est ni plus ni moins la pratique d’une profession au moyen de technologies de communication dans le but d’élaborer un diagnostic ou de proposer un traitement médical. On fait ici référence à une consultation par visioconférence entre personnes qui se trouvent dans des lieux différents (délocalisée) et sans documentation (dématérialisée). La télésanté comprend autant de domaines d’application que de champs de pratique : téléréadaptation, télénursing, télémédecine, télénéphrologie, etc. Connue depuis longtemps, la téléradiologie permet au radiologiste d’avoir accès par Internet à des radiographies depuis son domicile et de poser un diagnostic. La télésurveillance à domicile permet d’assurer le suivi d’une personne diabétique, la sécurité d’une personne âgée vivant seule et bien plus.

La télésanté ne comprend pas les communications téléphoniques, lesquelles restent nécessaires et utiles [2]. Ce type de télécommunication ne fait pas partie des communications se rattachant à de la consultation par télépratique.

L’expression « soins virtuels » est le terme généralement utilisé pour décrire l’ensemble des soins qui sont prodigués au moyen des technologies de l’information et de la communication (TIC).

Atouts et difficultés de la télésanté

Grâce à un important gain de temps et un accroissement de l’efficacité, la télésanté contribue à améliorer la pratique, mais contribue-t-elle à renforcer la relation patient-professionnel ? Par souci d’efficacité, va-t-on nuire à l’amélioration de l’état de santé qui prendrait sa source dans la relation de confiance qui s’établit ? Dans un contexte de relation numérique plutôt que dans le cadre d’un face-à-face devrions-nous craindre qu’un sentiment d’isolement se développe chez le patient ? Ces éléments essentiels doivent demeurer au centre de nos préoccupations en matière de santé.

Pour avoir accès à des soins de santé virtuels, il faut en avoir les moyens. Or, tous ne sont pas égaux devant la technologie, puisque l’accès aux réseaux numériques est inégal à travers les territoires. Sommes-nous en mesure de rejoindre toutes les personnes qui ont vraiment besoin de soins ? La télésanté révèle encore une fois l’inégalité des patients dans l’accès aux soins.

La télésanté pose un autre risque, celui de l’utilisation de plateformes non sécurisées pour échanger avec les patients. On doit se questionner à savoir si l’information est transmise et conservée de manière sécuritaire. L’hébergement des données confidentielles se fait-il dans le respect des lois ? La conservation des données se fait-elle dans un lieu sécuritaire et accessible pour le patient ? Une connaissance des lois sur la protection et le respect des données confidentielles est nécessaire [3] avant de mettre en place une pratique de télésanté.

Plusieurs autres questions restent d’ailleurs en suspens en lien avec la fiabilité des données, l’élaboration du diagnostic, le consentement libre et éclairé du patient, la confidentialité de l’environnement lors de la consultation, les situations d’urgence, l’implication du consultant, etc. Certaines pratiques ne se prêtent pas à la télésanté, quoique les avancées technologiques révèlent que les diagnostics à distance sont rendus possibles par des moyens de plus en plus sophistiqués.

Pour en savoir plus sur les enjeux et les précautions liés à la pratique de la télésanté, lisez la 2e partie de cet article, La Télésanté sous la loupe – Partie 2.


[1] Loi sur les services de santé et les services sociaux, L.R.Q., c. S -4.2, art. 3.

[2] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ, c. S -4.2, art. 108.1 al. 3.

[3] La Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information, RLRQ, c. C -1.1, art. 34 prévoit que la confidentialité des renseignements doit être protégée par un moyen approprié au mode de transmission de l’information.