Entre 2011 et 2016, trois études ont rapporté des problématiques spécifiques auxquelles faisaient face les aînés en matière de logement. La première de ces études a été réalisée par deux professeures de l’Université de Montréal [1] et la deuxième par l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR). Bien que les échantillons utilisés étaient limités, les résultats de ces études ont permis de constater que plusieurs clauses illicites ou abusives avaient été intégrées dans les baux de résidences pour personnes âgées. Cet élément vient illustrer l’importance de garantir une meilleure protection des droits des personnes âgées qui vivent en résidence privée [2].

La 3e étude a quant à elle été réalisée par le Protecteur du citoyen et était basée sur les plaintes reçues en 2010-2011 et en 2014-2015, ainsi que sur les consultations de représentants de locataires et de propriétaires, de même que d’organismes communautaires [3]. Ces trois études ont révélé plusieurs violations, en voici une liste.

Violations dans les baux : formulaires, règlement de l’immeuble et augmentation du loyer

Tout d’abord, contrairement à la loi [4], plusieurs baux des résidences pour personnes âgées n’utilisaient pas le formulaire de bail prescrit au moment de la conclusion du bail [5]. L’utilisation de formulaires est désormais obligatoire lors de la conclusion de tout bail de logement, que ce soit pour une résidence privée pour aînés (RPA) ou pour un appartement régulier. Leur non-utilisation est même passible de sanctions, dont la révocation de la certification de la RPA.

En 2015, les formulaires ont été bonifiés par un énoncé des droits et devoirs des propriétaires et des locataires. La non-utilisation des formulaires pouvait avoir des conséquences dramatiques, puisque les baux avaient alors plus de chances de contenir des clauses qui violaient le droit du locataire à son maintien dans le logement [6]. Des règles plus strictes ont été mises en place pour contrôler l’ajout de clauses illégales dans les baux.

Ensuite, les études ont démontré que les personnes âgées ne recevaient presque jamais copie du règlement de l’immeuble ou en prenaient possession et connaissance seulement lorsque le bail était conclu [7]. Or, le propriétaire doit maintenant remettre au locataire le règlement de l’immeuble, en plus de l’informer des services qui lui seront offerts durant le bail et des coûts respectifs associés à chacun.

Afin de contrôler les clauses des baux des logements pour aînés et de faire respecter davantage les droits des locataires aînés, on a proposé de favoriser l’accessibilité des aînés au règlement, d’imposer un formulaire de règlement de l’immeuble et de faire approuver les règlements de chaque immeuble pour obtenir la certification RPA. En 2018, une modification au Règlement sur la certification est donc venue imposer aux propriétaires de remettre aux locataires, en logement régulier ou dans une RPA, le règlement de l’immeuble.

Enfin, toutes les études ont révélé la pratique d’inclure des clauses permettant une augmentation du loyer en cours de bail. Or, de telles clauses au bail sont illégales [8]. On sait que la hausse des loyers est un enjeu particulièrement important pour les aînés, car la plupart d’entre eux reçoivent un revenu fixe. Il a été identifié qu’entre 2013 et 2017, les frais associés aux loyers des établissements pour aînés a connu une hausse moyenne de 4,7% par année au Canada [9]. Les enquêtes ont donc permis de mettre au jour des pratiques illégales, de modifier la loi et de faire respecter les droits des locataires aînés.

Dans le prochain texte, nous aborderons des avancées pour le maintien des aînés en logement.


[1] Marie Annik Grégoire et Sophie Gratton, « La légalité des baux de résidences privées pour personnes âgées: Étude réflexive sur l’effectivité des droits dans un contexte de vieillissement de la population » (2011) 70 Revue du Barreau 473.

[2] Marie Annik Grégoire, « Les baux en résidences pour personnes âgées: quelle effectivité pour la protection des droits? » (2016) 46 Revue générale de droit 277.

[3] https://protecteurducitoyen.qc.ca/sites/default/files/pdf/rapports_speciaux/2016-06-16_droit-aines-residences-privees.pdf, p.9, par.16.

[4] Règlement sur les formulaires de bail obligatoires et sur les mentions de l’avis au nouveau locataire, art. 1 etRèglement sur la certification des résidences privées pour aînés, art. 13.

[5] Marie Annik Grégoire, « Les baux en résidences pour personnes âgées: quelle effectivité pour la protection des droits? » (2016) 46 Revue générale de droit 277, à la p.289.

[6] Idem

[7] Marie Annik Grégoire, « Les baux en résidences pour personnes âgées: quelle effectivité pour la protection des droits? » (2016) 46 Revue générale de droit 277, aux p. 290-291; Protecteur du citoyen https://protecteurducitoyen.qc.ca/sites/default/files/pdf/rapports_speciaux/2016-06-16_droit-aines-residences-privees.pdf, à la p.18, par. 50; https://www.aqdr.org/wp-content/uploads/dossiers/dos_20121107.pdf, à la p.3.

[8] 1906 Code civil du Québec

[9] Les boomers font face à une «crise sévère du logement», selon l’agence de crédit DBRS, Huffington Post